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Le massacre de Kasika au Sud-Kivu: Toujours pas de justice 20 ans après

C’est en date du 24/08/1998, un matin du lundi que le village de Kasika est tombé sous le choc annonça le début de sa destruction. En dépit des milliers des morts estimés au-delà de 1000 personnes, enfants, femmes, hommes, prêtres et sœurs ainsi que le chef coutumier lui-même, les multiples discours populistes ont fini par plonger cette zone en désespoir difficilement relevable. Le pessimisme s’explique par un silence autour de ce dossier ainsi que d’autres qui sont similaires.

En commémorant ce massacre, prenons le courage de devenir humain pour quelques raisons : D’une part, les victimes de Kasika ont inévitablement des tueurs au différent degré, allant de la responsabilité directe et indirecte ainsi qu’à la complicité. Ensuite, indépendamment des motifs à avancer pour justifier ces crimes commis, Kasika n’a pas encore retrouvé la justice et réhabilitation des victimes. En dernier lieu, les tueurs sont à traiter responsable individuellement car n’ayant été pas mandatés par leurs communautés ethniques.

Le grand défi de ce silence et désespoir est la culture d’impunité qui règne sur ce terrain congolais depuis des années. L’ensemble de ces odieux crimes m’amène à penser que l’impunité ne prend pas seulement une forme de laisser-aller/faire les bourreaux ; mais aussi, elle peut prendre une forme d’échanger le silence entre différents acteurs, pour des raisons sujets de débat. Ces acteurs, d’une manière ou d’une autre peuvent comploter pour ne rien dénoncer car pourra déclencher un processus qui mettra à jour tous les crimes commis. De lors que exposer tous ces crimes rappelle la responsabilité des uns et des autres, la lâcheté conduise au silence. D’autres raisons peuvent bien sûr exister.

D’une manière particulière, en République Démocratique du Congo (RDC), l’impunité et la justice font balancer des chiffres pour soit se déculpabiliser dans la mesure où certains diront que les crimes dépendent du nombre des personnes tuées ; alors que les autres sont tentés de penser que l’intention discriminative/sélective est plus à considérer. En fin, ces crimes restent impunis, la justice est demandée sélectivement sur des bases politisées avec d’intox comme si on demandait justice n’ont pas pour honorer les victimes mais pour mobiliser les masses.

Que s’est-il passé à Kasika en date du 24/08/1998 ?

Une rébellion éclate en date du 02/08/1998 quand la famille politique Kabila-Kabarebe se disloque ; l’Est du Congo en particulier ainsi plusieurs villes du pays jusqu’à Kinshasa entrent dans la désolation. La deuxième guerre prend une forme des revendications politiques à caractère communautaire dans un premier début ; et plus tard celles exigeant la démocratie. Les motivations explicitées restent aussi sujet à débattre car au fond, d’agendas cachés existaient. Alors une chasse à l’homme commence dans différentes villes du pays, ciblant certaines communautés ; mais surtout celles de l’Est. Cette chasse n’épargne pas ni civils ni militaires comme s’ils étaient tous d’ennemis du pays. Sans tenir compte des considérations de droits humains, il reste aussi difficile de savoir si ceux-là chassés avaient vraiment cédé a la manipulation pour envahir leur patrie.

A Kindu en province de Maniema, un groupe des militaires conduits par le feu commandant Moise Segabiro ne semblait avoir plus de choix devant cette menace de chasse à ce groupe d’individus, sur des bases ethno-communautaires. La solution la moins risquée mais qui donnerait de l’espoir de survie pour feu Moise et son groupe était de rejoindre la nouvelle rébellion. La trajectoire est estimée à 1000 Kms à pied de Kindu vers Bukavu. Les rebelles du Rassemblement Congolais pour la Démocratie (RDC) avec leurs allies de l’Armée Patriotique Rwandaise (APR) avancent aussi vers Kindu. Entretemps, les rebelles cherchaient comment venir en aide au groupe venu de Kindu. Les militaires du RCD-APR passèrent par Kasika, en zone de Mwenga où ils se reposèrent et discutèrent avec le Mwami de la communauté Banyindu[1]. Le Mwami feu François Naluindi Mubeza ; sage à jamais, il était âgé de 35 ans et récemment marié à feu Yvette Nyangi. La nouvelle mariée était enceinte pour 7 mois et attendait son premier bébé.

En accueillant les rebelles et allies, Mwami Francois Mubeza livre à ses hôtes tout ce qu’il pouvait, chèvres sont égorgées et partagées en symbole d’accueil de nouveaux chefs. Le Mwami rassure ses interlocuteurs que la situation est calme et sous contrôle ; donc la sécurité n’était pas menaçante. Bien qu’une réunion ait été tenue la veille entre Mwami Mubeza et Nyakiliba pour dissiper le mécontentement de la part du dernier voué à défendre a corps et cri sa patrie contre l’invasion qu’il appelait « Tutsi ». Nyakiliba, un chef presque ambitieux qui veut ‘défendre’ la patrie mais accroitre à même temps sa popularité. Au cours de la réunion, le Mwami Mubeza se dit inquiet du comportement de Nyakiliba et les dégâts que cela poserait surtout à la population s’il essayerait de s’interposer.

Le Mwami Mubeza qui, non seulement sage, s’était livré aux actions de développement de cette zone. Il avait déjà initié des coopératives agricoles à Kasika et ses environs. Jeune mais sage par son expérience car croyait qu’une fois Nyakiliba attaquait les rebelles, les représailles seront désastreuses pour sa population. Mwami Mubeza était un chef qui pouvait se sacrifier, devant ses moyens limités, pour sauver sa population. Un témoin qui a assisté a la réunion entre Mubeza et Nyakiliba se souviendra toujours du propos du Mwami interpella Nyakiliba : «  Crois-tu que tu seras un héros ? Mais tu auras moi personnellement et toute la population tués ». Quels que soient ses conseils, Nyakiliba continua à organiser sa milice, peut-être à l’insu de Mubeza. Toutefois, sa milice avec quelques armes possiblement et ne représentait pas un danger alarmant pour que Mwami Mubeza s’en inquiète plus.

De passage pour rencontrer Moise, le convoi des militaires RCD-APR est attaqué à distance par la milice Nyakiliba qui ne pouvait pas résister longtemps. C’est alors du retour, le dimanche 23/08/1998 que l’incident qui détruisant Kasika est survenu. Les militaires venus de Kindu, fatigués étaient embarqués dans un camion ; alors que feu Moise avec d’autres officiers etaient dans un pick-up. Aux alentours de la résidence du Mwami Mubeza dans plein centre de Kasika, le pick-up connait une panne technique. Le camion avec les militaires continua sa route, c’est alors pendant les manœuvres de réparation du pick-up que des balles tirées à partir d’une hutte aux environs touche Moise et deux autres officiers qui tombèrent sur place. Sous les yeux effrayés de la population locale, les morts sont embarqués vers Bukavu le même jour.

Le calvaire dans Kasika commence le lendemain matin aux environs de 6.30. ; Une multitude de personnes sont sauvagement massacrées par les rebelles. Etonnement, les tueries n’ont même pas épargné ceux-là en pleine messe, en commençant par le père-cure, les sœurs et croyants qui étaient dans l’église. La suite d’événement macabre se poursuit chez le Mwami Mubeza, lui et sa famille ont tous succombés dans ces tueries. Les témoins rapportent que les environs de Kasika jusqu’aux dizaines de Kilomètres, plusieurs personnes sont sauvagement tuées au nom des représailles. Incroyable !

Sans entrer en détails de cette mort qui fera que les rebelles RCD-RPA endeuillent Kasika, l’article émet de doute sur la panne technique du pick-up et surtout les balles tirées à partir des huttes dans Kasika. Sur base d’expérience de cette région, il se peut que cette population ait été « victimisée » par Nyakiliba alors qu’il peut s’agir d’une situation trouva origine dans l’hégémonie entre alliés. De plus, le massacre commis après une nuit toute entière porte à croire qu’il ne s’agit pas d’un acte moins murie. L’amalgame de ce massacre reste aussi horrible car il est injustifiable de penser que ces milliers d’enfants, femmes, religieux … tous aient complotés pour tirer sur le pick-up. Donc, c’est plutôt des crimes à situer dans le cadre de la culture d’impunité qui a rongé le pays depuis les années 60 à nos jours.

Le dossier Kasika, un village qui a perdu le père de la paroisse, le chef coutumier et toute sa famille, des milliers de paisibles citoyens reste dans les oubliettes. Alors qu’en 1998 vers 2000, Kasika est rechanté dans d’innombrables discours politiques au point de faire l’objet des leçons scolaires du patriotisme même à Kinshasa ; il n’a jamais connu justice ni investigation indépendante pour déterminer les faits. Les rescapés de Kasika restent isolés et sans assistance ni accompagnement socio-psychologique comme c’est pareil dans plusieurs cas similaires.

En commémorant, pour la 16e fois, ce massacre, il est temps de considérer encore une fois que les crimes impunis conduisent à la ruine d’une société. Il est temps aussi de plaider pour une justice non-sélective visant à reconstruire ce tissu social détruit au sein de la société congolaise. La vengeance et l’amalgame ne sont pas sincèrement des pistes confiantes de solutions à long terme. Les recommandations du bloggeur sur la criminalité et l’impunité en RDC peuvent être retrouvées dans cet article (appuyer sur ce lien et en derniers paragraphes).

Que la justice pour tous soit rendue au nom d’un avenir meilleur.

Ntanyoma R. Delphin, (Massacre de Kasika: 16 ans de Discours Populistes, Silence et Désespoir)

Compte Twitter @delphino12

Email: [email protected]

Blog: www.edrcrdf.wordpress.com

[1] Le bloggeur s’est inspiré du récit complet de cette histoire que vous pouvez trouver dans Jason K. Stearns (2012), ‘Dancing in the Glory of Monsters : The Collapse of the Congo and the Great War of Africa’, PublicAffairs, New York

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